Cette année, j’ai commencé à lire ce livre le 8 mars, Journée internationale des droits des femmes ; le relire plutôt, car je l’avais lu à sa sortie en… 1965.
Autobiographie d’une femme rebelle et indépendante, à une époque où le féminisme exigeait une tout autre vaillance qu’aujourd’hui.
Quelle femme en effet ! Pour ma génération ce fut une révélation. Mais pour les jeunes générations c’est sans doute une inconnue. Je précise donc pourquoi nous en fîmes notre héroïne :
Albertine Sarrazin (1937-1967) connait un début de vie chaotique : abandonnée à la naissance, adoptée à deux ans par un couple sans enfant : le père âgé, médecin militaire, la mère âgée également. À dix ans, elle est violée par son oncle.
Ses premières années de collège sont excellentes. Mais à 15 ans elle ne supporte pas l’internat au lycée. Son père la traîne chez un psychiatre puis un juge accorde le placement en maison-prison de correction.
En 1953, elle passe avec succès la première partie du baccalauréat… et s’enfuit à Paris. Elle y retrouve une camarade avec laquelle elle vit d’expédients, se prostitue, vole dans les voitures et les magasins. Elle dérobe le pistolet de son père et tente un hold-up où son amie blesse une vendeuse. Elles sont arrêtées et envoyées à la prison de Fresnes. La cour d’assises la condamne à sept ans de prison. Ses parents révoquent son adoption.
En avril 1957, elle s’évade en sautant le mur d’enceinte et se brise l’astragale, un os du pied. Julien Sarrazin, un délinquant, la récupère en voiture, la cache, la soigne et en devient amoureux.
En mars 1958, Julien est arrêté et incarcéré. Albertine se prostitue pour survivre. Quelques mois plus tard, Julien est libéré mais Albertine est arrêtée pour usage de faux-papiers et doit purger sa peine antérieure. Elle étudie la philosophie, l’anglais, commence à écrire.
En février 1959, Julien et Albertine se marient à la mairie du Xe arrondissement entre deux gendarmes. Julien est à nouveau condamné pour fric-frac jusqu’en septembre 1960. En 1961 Julien est encore emprisonné pour vol de bijoux et Albertine pour recel. Elle est libérée le 6 juin 1963.
En janvier 1964 elle s’installe dans les Cévennes ; en mai Julien est libéré.
Un journaliste l’adresse aux éditions Jean-Jacques Pauvert qui acceptent de publier L’Astragale et La Cavale. En 1966, ses livres connaissent un grand succès. Elle achève La Traversière fin 1966.
Albertine et Julien vivent enfin heureux à proximité de Montpellier.
Mais Albertine doit subir une opération pour tuberculose rénale à la clinique Saint-Roch de Montpellier. L’anesthésiste non diplômé ne l’examine pas avant l’opération, ne demande ni son groupe sanguin ni son poids ; elle n’est pas surveillée en salle de réveil. Elle décède le 10 juillet 1967. A 29 ans. Elle aura connu dix ans d’enfermement.
Julien porte plainte, le parquet classe sans suites, mais Julien fait appel et gagne le procès : le chirurgien et l’anesthésiste de la clinique Saint-Roch sont condamnés pour homicide involontaire.
Julien Sarrazin décède en 1991.
Alors lisez ce magnifique roman, L’astragale. Roman ? Non, puisque c’est le récit autobiographique de l’évasion d’Albertine et de l’année qui suivit…
5 juillet 2018