Alfonsina Storni Martignoni était une poétesse argentine dont le destin tragique inspira une chanson, Alfonsina y el mar qui fut un succès mondial.
Inutile de préciser que j’ai connu la chanson bien avant de m’intéresser à l’écrivaine. C’est pourtant elle qui mérite mon évocation.
Alfonsina Storni Martignoni, toute jeune enfant, vint de Suisse en Argentine avec ses parents dans les dernières années du XIXe siècle.
Jeune adulte, elle fut une des pionnières du féminisme dans ce pays très fortement empreint d’un machisme sans complexe et fier de l’être. Pour vivre libre, donc indépendante, elle fut institutrice pour enfants handicapés, conseillère de bibliothèques populaires de gauche à Buenos Aires et enfin journaliste, sous pseudonyme évidemment.
En Argentine elle fréquenta Jorge Luis Borges, Luigi Pirandello, Federico Garcia Lorca, Filippo Tommaso Marinetti. Et d’autres moins connus en France comme Horacio Quiroga ou Francisco López Merino.
A vingt ans en 1916 elle publia son premier recueil de poésie La inquietud del rosal (L’agitation du rosier), puis en 1918 El dulce daño (Le doux mal), en 1919 Irremediablemente, en 1920 Languidez (Langueur), en 1925 Ocre, en 1926 Poemas de amor, en 1934 Mundo de siete pozos, en Mascarilla y trébol (Monde des sept puits de masque et trèfle).
La plupart de ces œuvres ont été publiées en traduction chez Cap de l’Étang Éditions, mais elles ne sont pas toujours faciles à trouver. Heureusement un recueil, Poésies choisies et inédites, traduction de Monique-Marie Ihry, vient d’être publié chez cet éditeur.
Atteinte d’une maladie mortelle, Alfonsina Storni s’installa dans un hôtel de Mar del Plata en 1938 où elle se suicida à 46 ans en se jetant dans la mer, après avoir écrit son dernier poème Voy a dormir (Je vais dormir) :
Dents de fleurs, coiffe de rosée,
mains d’herbe, toi ma douce nourrice,
prépare les draps de terre
et l’édredon sarclé de mousse.
Je vais dormir, ma nourrice, berce-moi.
Pose une lampe à mon chevet;
une constellation, celle qui te plaît;
elles sont toutes belles : baisse-la un peu.
Laisse-moi seule : écoute se rompre les bourgeons…
un pied céleste te berce de tout là-haut
et un oiseau esquisse quelques voltes
pour que tu puisses oublier… Merci. Ah, une dernière chose :
s’il venait à me téléphoner
dis-lui qu’il n’insiste pas et que je suis sortie…
La chanson en son hommage, Alfonsina y el mar (texte de Félix Luna et musique d’Ariel Ramírez), sortit en 1969 interprétée par Mercedes Sosa ; ce fut immédiatement un succès international repris par de nombreux chanteurs et musiciens. Nous l’écoutions souvent en soirées amicales ou tiers-mondistes, sans savoir (sans avoir cherché à savoir) qu’une poétesse ayant vécu en était l’inspiratrice.
2 octobre 2021
Alfonsina y el Mar – Mercedes Sosa 1969
Alfonsina y el Mar – Avishai Cohen
Alfonsina y el Mar – Lucilla Galeazzi & l’Arpeggiata
Alfonsina y el mar – Placido Domingo
Alfonsina y el Mar – Rita Payés & Elisabeth Roma (guitare)
Alfonsina y el Mar – Giovanni Mirabassi
Alfonsina y el Mar – Cristina Branco
Alfonsina y el Mar – Mariana Flores & Quito Gato (guitare)