Spleen et idéal : XXIV – Je t’adore à l’égal de la voûte nocturne…

Je t’adore à l’égal de la voûte nocturne [1],
Ô vase de tristesse, ô grande taciturne,
Et t’aime d’autant plus, belle, que tu me fuis,
Et que tu me parais, ornement de mes nuits,
Plus ironiquement accumuler les lieues [2]
Qui séparent mes bras des immensités bleues.

Je m’avance à l’attaque, et je grimpe aux assauts,
Comme après un cadavre un chœur de vermisseaux,
Et je chéris, ô bête implacable et cruelle !
Jusqu’à cette froideur par où tu m’es plus belle !

Georges Chelon 1997

[1] Tout le poème file la métaphore entre la Femme et la voûte céleste.
[2] Unité de distance déjà archaïque à l’époque de Baudelaire (4 km)