2024 08 25 : Antonio de Cabezón

Antonio de Cabezón (1510 – 1566) fut un compositeur espagnol à l’époque charnière Renaissance-Baroque, âge d’or du contrepoint et de la polyphonie, et Siglo d’oro des Habsbourg de Charles Quint et Philippe II ; apogée économique, militaire et donc culturelle : l’Espagne du Greco, de Cervantes et de Lope de Vega.

Signe que les frontières nationales en musique sont imparfaitement abolies, tandis que Tomás Luis de Victoria est identifié par le public mélomane français, Antonio de Cabezón en est quasiment inconnu (je ne me souviens pas avoir un jour entendu en concert une composition de Cabezón), alors qu’il fut admiré et influent en Europe et qu’il reste célèbre en Espagne et dans le monde hispanophone (par exemple le compositeur mexicain Manuel María Ponce a composé pour guitare en 1948 les Variaciones sobre un tema de Antonio de Cabezón). Certains admiradores l’appelant non sans une pincée de soberbia « le Jean-Sébastien Bach espagnol »..

Néanmoins et pour prendre la mesure de son génie, en le situant dans le contexte musical de son époque, il est impressionnant d’entendre combien Cabezón était à la fois nourri de ses maîtres musicaux antérieurs et contemporains et combien il innova. Par exemple dans l’art de la variation instrumentale, avant Corelli, Rameau ou Haendel, et splendide précurseur de Jean-Sébastien Bach (qui ne naîtra qu’un siècle et demi plus tard), de Mozart et de Beethoven, ses plus lointains continuateurs encore.

Un autre point commun que je lui accorde volontiers avec Jean-Sébastien Bach, c’est que chez les plus endurcis des agnostiques, la perfection de cette musique et son élévation d’âme les obligerait presque à consentir qu’il y a au-dessus ou au-delà de la condition humaine quelque grandeur qui la dépasse, qui la transcende… et aussi qui nous oblige en responsabilités et en devoirs. Cabezón était aveugle, mais quelle vision des choses de l’esprit n’avait-il pas !.

25 août 2024