Je n’ai jamais été passionné de fantastique : ni en bande dessinée, ni en littérature, ni en peinture, malgré le roman amusant de Jacques Cazotte, Le Diable amoureux à la fin du XVIIIe siècle, tandis que les romans gothiques anglais de la même époque m’ennuyaient et que les fantastiques allemands du siècle suivant me laissaient du marbre de la pierre tombale qu’aucun revenant ne vient soulever.
J’avais lu et apprécié la Peau de Chagrin de Balzac mais « en passant », ce ne fut qu’un de ses 90 romans, il ne récidiva pas ; je porte une grande admiration à Gautier comme poète mais pas comme romancier fantastique ; idem pour Nerval. Quant à Maupassant j’apprécie ses nouvelles fantastiques parce que ce sont des nouvelles et non des développements alambiqués sur ce thème.
La promotion qu’en firent les surréalistes dans les années 1920 ne peut dissimuler qu’ils considéraient néanmoins le fantastique comme un genre mineur, à ne pas confondre avec leur fascination pour le hasard et le mystère.
Donc j’allais au Musée Jacquemart-André voir cette exposition temporaire surtout parce que je suis admiratif du cadre de ce merveilleux musée, fruit d’une magnifique histoire d’amour entre Mademoiselle Jacquemart et Monsieur André. J’y allais donc sans enthousiasme pour Füssli… et je me mettais le doigt dans le mauvais œil !
Car l’œuvre de Johann Heinrich Füssli, au début du XIXe siècle, est digne d’admiration : c’est de la peinture fantastique certes, mais très fortement imprégnée de romantisme, et du meilleur. Et son inspiration n’est pas étroite, mais diversifiée, aussi bien l’Antiquité et la mythologie que la littérature anglaise (il vivait dans cette île) de Milton et Shakespeare, que la Renaissance italienne.
Donc cette exposition a le grand mérite de nous présenter (et largement : une centaine d’œuvres) ce peintre quasiment méconnu du grand public.
23 décembre 2022