Je te donne [1] ces vers afin que si mon nom
Aborde heureusement aux époques lointaines,
Et fait rêver un soir les cervelles humaines,
Vaisseau favorisé par un grand aquilon [2],
Ta mémoire [3], pareille aux fables incertaines,
Fatigue le lecteur ainsi qu’un tympanon [4],
Et par un fraternel et mystique [5] chaînon
Reste comme pendue à mes rimes hautaines ;
Être maudit à qui, de l’abîme profond
Jusqu’au plus haut du ciel, rien, hors moi, ne répond !
— Ô toi qui, comme une ombre à la trace éphémère,
Foules [6] d’un pied léger et d’un regard serein
Les stupides mortels qui t’ont jugée amère,
Statue aux yeux de jais [7], grand ange au front d’airain [8] !
Georges Chelon 1997