Non, nous n’allons pas apporter notre salve de mitraille à la guerre (guérilla, guéguerre, guerre de tranchées ou guerre en dentelle ?) qui donne en ce moment une image un peu consternante de l’hôpital et de ses clivages, intelligemment ravivés par le projet de loi HPST, alors qu’ils s’atténuaient depuis cinq ans de nouvelle gouvernance…
Nous voulons réagir à ce qu’il faudrait d’ailleurs plutôt écrire casi belli, car ils sont trois, les évènements que nous avons notés ces dernières semaines comme des signes d’hostilité ou de dédain à l’encontre de nos établissements publics.
L’enveloppe allouée aux EHPAD pour 2009 et la circulaire scélérate qui en précise le mode de calcul et recomptabilise en crédits 2009… une part d’enveloppe CNSA 2008 que les DDASS n’avaient pas entièrement distribuée (450 M €, excusez du peu !). Assortie d’une convergence tarifaire… à reculons. Après tant de déclarations d’intention, le message est limpide : l’effort consenti envers nos anciens n’est qu’un luxe dont on peut se passer en temps de crise. A charge pour les collectivités territoriales de pallier la défausse de l’Etat, quitte à les accuser bientôt (car nous entrerons en période électorale) de laisser filer leurs budgets par laxisme ou démagogie. Quant aux usagers et familles, l’allègement de leur « reste à charge » attendra 2010. Le pouvoir central a certes la main sur le cœur ; mais entre le cœur et la main il y a… le portefeuille. Bel exemple de « bonnes pratiques ».
L’émission du 3 mars sur France 2 consacrée à l’hôpital : du beau linge, des belles manières, des échanges à fleuret moucheté, les gracieux battements de cils et les mouvements de mains très étudiés de l’animatrice, Mme Schönberg. Car ce soir-là, la vraie vedette n’est pas l’hôpital et ses acteurs, mais la présentatrice. Tellement imbue de son importance qu’à un moment, interpellant notre ministre à propos des personnels hospitaliers, elle lui demande, péremptoire, « avez-vous ce soir une annonce à nous faire en faveur de ces personnels ? ». Ainsi donc, à qui croyez vous qu’une ministre de la République, tout le jour au Parlement en débats législatifs ou en discussion avec les organisations professionnelles, doit la primeur de ses décisions ? Aux mandataires de la démocratie élective ou représentative ? Non ! A une people sans responsabilités mais qui fait 12,6 % d’audimat…
Le livre noir des hôpitaux : si noirceur il faut rechercher, c’est dans la méthode employée par les trois auteurs. Il y a dans l’ouvrage une part de vérité factuelle incontestable ; admettons même, pour faire court et ne pas nous égarer dans un commentaire détaillé ‑ que nous livrerons par ailleurs ‑ que tous les errements évoqués dans le livre soient avérés, cela démontre quoi ? L’hôpital réalise annuellement 15 millions d’hospitalisations et 45 millions de consultations, compte 840 000 agents dont 120 000 décideurs. Alors, quels taux, quelles fréquences ? En quelle proportion sont-ils réductibles ? Les auteurs préfèrent conclure en affirmant que parler « qualité » à l’hôpital est ressenti par les acteurs « comme un gros mot ou un soupçon insupportable ». Contre-vérité méprisante…
Laissons les exégètes relier ou non ces trois faits entre eux, en proposer une interprétation du genre « un complot contre l’hôpital » pour les pessimistes, ou « ça fait vendre, ça, coco » pour les optimistes. Contentons-nous d’un constat objectif : 1° Les atermoiements sur le financement de la gériatrie sont consternants, mais en même temps ils forcent le débat à revenir sur la mise en œuvre rapide et effective du cinquième risque. 2° L’hôpital est en bute à des critiques brouillonnes… mais en même temps jamais le nombre d’émissions largement favorables, laudatives, parfois angéliques ou même niaises, n’a été aussi élevé. 3° Paraît un livre, noir d’injustice et de parti-pris, mais il pourrait contribuer à bousculer nos dernières inerties et doper une démarche qualité déjà largement engagée. Intéressants paradoxes …