Que l’on n’imagine pas que mon abus de lectures poétiques m’ait addicté au vers fameux : Je suis hanté. L’Azur ! l’Azur ! l’Azur ! l’Azur ! du grand Stéphane Mallarmé ; je me nourris de son hermétisme avec circonspection car je ne partage pas son interrogation défaitiste Où fuir dans la révolte inutile et perverse ?
Qu’on ne suppute pas qu’in petto le poète Georges Brassens m’ait obsessionné avec son aveu : Je suis hanté le rut le rut le rut ! car si la chose m’importe encore avec un poil de modération le mot m’insupporte avec une turgescente détestation.
Que l’on ne m’accuse pas davantage d’avoir couru inconsidérément sur les traces de l’autre grand poète maudit, Arthur Rimbaud et d’être étourdiment descendu 2 200 km trop au sud, à Zanzibar, terre d’agrément assortie de Zen indubitablement.
Que l’on ne spécule pas sur ma propension aux jeux de mots douteux : que j’insinuerais là que z’an ai marre de ce Président zan-foutre, de ces conquis sociaux de 1936 et 1945 qui sont zanterrés par des zanmerdeurs patentés contre lesquels je vitupère, moi l’insoumis à cent pour zan.
Non, dans mes soirs de rêverie nostalgique me reviennent simplement ces sorties de l’école, il y a donc 65 ans z’an suis sûr, où, osant un léger crochet sur le chemin du retour, j’entrais avec quelques copains dans la boulangerie du quartier pour m’acheter un Zan.
Pour les ignares, c’est-à-dire les non-victimes du chiffre d’âge que je viens d’avouer ci-dessus, le Zan était un délicieux rouleau d’un souple ruban de réglisse, aussitôt consommé avant que de rentrer à la maison en s’essuyant soigneusement les lèvres pour n’être pas confondu pour ma gourmandise.
Qu’il était savoureux ce Zan ! On disait d’ailleurs à l’époque le réglisse et non la réglisse, comme quoi le transgenrisme n’est pas né d’aujourd’hui, nous le pratiquions déjà à l’insu de notre ignorance et de notre innocence.
Ignorance, oui, car nul ne m’avait informé que l’abus de cette substance était susceptible de créer des troubles cardiaques, plus dangereuse donc que le cannabis et autres malheureuses addictions, because son acide glycyrrhizique, mais nul n’en savait alors la zizique.
Désormais, sagement informé et sérieusement éveillé aux bons comportements de santé, les soirs d’hiver, quand il me faut un cordial je ne consomme donc plus un Zan mais un vieil Armagnac, comme le vieillard maniaque que je risque de devenir avec les zans…
5 décembre 2022