La musique est universelle parce que son expression n’est pas celle d’une langue en particulier mais parle à toutes les oreilles et à tous les cœurs : c’est une banalité que de rappeler cela.
La poésie au contraire, Ô douleur ! ô douleur ! se heurte cruellement à la barrière langagière, puisque le miracle poétique provient, c’est évident, tout autant du sens des mots, du propos que transmet le poète, que de la musique de ces mots à l’oreille : et c’est pour cela qu’il faut écouter la poésie ou la lire à voix haute.
La meilleure des traductions traduit fidèlement le propos, mais inévitablement trahit la sonorité du poème. Perte en chemin aggravée du fait que la musicalité d’une langue maternelle n’est pas ressentie identiquement par un étranger, et l’acculturation est ici primordiale.
Ces truismes exposés, il faut aussi observer que la sonorité de certaines langues peut se métamorphoser selon le discours qu’elles expriment, ceci indépendamment du ton adopté par l’orateur.
Tandis que d’autres langues au contraire semblent d’une résonance uniforme quel que soit leur contenu : comparez une scène tragique de Shakespeare et un exposé de Tony Blair et vous en conviendrez. La misérable comédie de Blair est tout entière dans la banalité mensongère de son propos.
En revanche, une langue comme l’allemand revêt des sonorités différentes selon le message qu’elle porte. Ecoutez par exemple ce merveilleux lied des Amours du poète de Robert Schumann :
Aus meinen Tränen sprießen (De mes larmes s’épanouissent)
Supportez maintenant (quelques instants, je n’abuserai pas de votre tympan) une éructation barbare d’Adolf Hitler contre les Juifs :
Discours d’ Adolf Hitler sur le Juif international
Saisissant, non ?
14 avril 2022