2019 10 03 : Ian Bostridge – Le Voyage d’hiver de Schubert

C’est du livre dont je veux parler tout d’abord. Quantitativement vous en aurez pour votre argent : 420 pages bien serrées consacrées à une œuvre qui dure 1 heure 15 ! Calculez : 6 pages par minute de musique, 1 page toutes les 10 secondes. Il vaut mieux donc le lire séparément que pendant l’audition !

Mais quelle invitation au voyage ! Dans l’une des musiques à mon sens les plus tristes mais les plus bouleversantes et prenantes du répertoire.

Je n’apprécie pas vraiment le compositeur Pierre Boulez, je suis insensible pour ne pas dire hermétique à ses œuvres ; mais enfin, étant béotien en musique, mon opinion est sans doute très subjective.

J’ai une autre raison plus rancunière de ne pas apprécier Boulez : pour avoir déclaré que « Si Schubert n’avait pas existé, l’histoire de la musique n’en aurait été nullement modifiée ».

Certes, que cet iconoclaste autoproclamé, contestataire adulé des ministres, soit devenu le pontifiant surintendant officiel de la musique « d’avant-garde », une resucée de Lully au XXe siècle, captant à son profit une grande part des subventions, est déjà un début de réfutation de son propos.

Certes, Schubert n’a composé que jusqu’à 31 ans, tandis que Boulez, paix à ses cendres, eut loisir de le faire jusqu’à 90 ans, donc le match ne fut pas égal.

Mais, quant au fond, qu’on puisse dédaigner Schubert pour ses Moments musicaux, certaines de ses sonates, je peux l’admettre… mais pour des monuments comme le Winterreise ! Où donc Boulez avait l’oreille ?

Je ne suis évidemment pas de niveau à écrire trois lignes en défense et illustration de l’œuvre de Schubert ; mais Ian Bostridge, lui, le fait magistralement.

D’autant plus et mieux peut-être que ce Winterreise, il l’a chanté. Et que son interprétation de 2004 avec le pianiste Leif Ove Andsnes est reconnue comme l’une des plus mémorables de ce siècle, avec celles de Christoph Prégardien ou de Matthias Goerne, et supporte la comparaison avec les inoubliables versions de Dietrich Fischer-Dieskau, Josef Greindl ou encore Hans Hotter au siècle précédent.

Franz Schubert – Winterreise D.911 – Matthias Goerne

3 octobre 2019