2014 02 18 : Deux beaux personnages de l’époque (Jalil Lespert – Yves Saint Laurent)

guillaume-gallienne-yves-saint-laurentJe suis allé voir – je devrais plutôt dire qu’on m’a emmené voir – le film Yves Saint Laurent de Jalil Lespert. A priori dubitatif (les films sur des personnages ayant existé me semblent souvent décevants) j’en suis ressorti enchanté.

Ce n’est pas tant la qualité artistique et esthétique du film qui m’a semblé exceptionnelle : le réalisateur n’est sans doute pas (pas pour l’instant en tout cas) un grand du 7e Art. L’image n’est pas inoubliable.

Laura SmetMais les acteurs ! Pierre Niney en Yves Saint Laurent, extraordinaire, tout le monde je crois en a convenu ; Guillaume Gallienne en Pierre Bergé, à la fois sobre et véridique ; Laura Smet, très attachante en Loulou de la Falaise ou encore Charlotte Le Bon, crédible en Victoire Doutreleau.

pierre-niney-saint-laurent-cMais les personnages ! Et c’est là selon moi le plus grand mérite du réalisateur et des scénaristes : nous montrer combien Yves Saint Laurent fut bien davantage qu’un couturier de talent, mais un immense artiste et qu’avec lui la mode n’a jamais moins mérité le qualificatif « d’art mineur » dont certains l’affublaient encore dans les années 60. Alors que ce fut l’un des plus grands artistes français du XXe siècle, bien plus inspiré, c’est mon avis, que Bernard Buffet qui apparaît à plusieurs reprises dans le film ; et aussi le premier à ne pas négliger le prêt-à-porter ; ou encore l’un des premiers à faire défiler des mannequins noires.

yves_saint_laurent_jeune_referenceLa couture, donc, un art mineur ? Ce film a le mérite de pulvériser cette assertion dédaigneuse. On y voit d’ailleurs qu’YSL n’a cessé d’être inspiré par les autres arts, ceux que tous s’accordent à dire « majeurs » : Mondrian, Picasso, Matisse, Braque, Van Gogh… en peinture ; Diaghilev en danse ; Apollinaire, Cocteau, Proust… en littérature.

pierre bergéLe personnage de Pierre Bergé montre aussi combien il ne fut pas seulement le compagnon d’YSL ou son agent financier, mais l’élément indispensable du binôme : sans lui, sans doute que l’inspiration d’YSL ne se fut pas épanouie à ce point, sa personnalité fragile se fut abîmée dans l’univers insouciant mais féroce des nuits parisiennes, son équilibre mental se fut altéré dans cet univers exigeant de la création, emporté par ses souffrances et ses addictions. J’ai regretté que le rôle de Pierre Bergé ne soit pas assez mis en relief.

yves-saint-laurent-victoire-doutreleau-640x747Mon regret le plus fort ‑ pour ne pas dire reproche, le réalisateur peut-être n’y pouvait mais ‑ serait de ne pas avoir donné la part encore plus belle à l’art d’YSL : il eut fallu nous montrer encore et encore ses créations, ses créations, ses créations ! Il est vrai qu’on a droit à quelques scènes de défilés, (la couleur d’époque y est : elles me rappelaient violemment les quelques défilés Dior auxquels entre 8 et 10  ans j’eus l’honneur d’assister, car l’une de mes tantes y exerçait comme première couturière et obtenait des invitations pour ma mère et moi). Certes le défilé des Ballets Russes est bien rendu, mais à mon sens il aurait fallu d’autres scènes de ce genre.

En tout cas, un beau film, qui montre que la France est l’une des grandes patries de la création artistique.

18 février 2014