Tout feu tout flamme ?
Ceux qui s’imagineraient lire un brûlot en achetant le livre du célébrissime urgentiste de St Antoine en seront pour leurs frais. Car s’il distribue allègrement quelques volées de bois encore vert, il semble à maintes reprises retenir sa main pour ne pas aller jusqu’au sang.
L’ouvrage est consacré presque entièrement à la canicule de l’été 2003, dont le récit est entrecoupé de considérations sur le parcours du narrateur et l’idée qu’il se fait aujourd’hui de l’hôpital public. Il y a le réquisitoire, qu’on a déjà lu d’ailleurs sous d’autres plumes de droite ou de gauche, contre le mandarinat, la sclérose intellectuelle, les arrangements petits et grands, l’autisme et la suffisance des hauts fonctionnaires, la méconnaissance des réalités par les directeurs, la bureaucratie envahissante et la paperasserie proliférante.
Mais il y a surtout chez Patrick Pelloux une conviction forte, qui nous a paru être la clé de son analyse : l’organisation sanitaire en général et l’hôpital public en particulier ne s’en sortiront que par une refondation démocratique, pas par une simple réforme. Et qu’à cet égard la canicule 2003 aura été un élément déterminant poussant les uns et les autres, volens nolens, vers cette issue inévitable.
On peut certes ne pas partager ses appréciations à l’emporte-pièce, contre Hôpital 2007 « projet cohérent de privatisation capitaliste de la santé » ou contre la T2A « qui entraînera la sectorisation marchande de l’espace hospitalier, la fin programmée de l’hôpital public ».
Mais comment ne pas partager, finalement, ce diagnostic plus profond et subtil que l’image tapageuse à laquelle d’aucuns réduisent P. Pelloux ou qu’il favorise lui-même : « l’hôpital manque de moyens, mais surtout d’objectifs et du sens régénéré de sa mission humaniste ».
Patrick Pelloux
avril 2004 – 260 pages – 18 €
Fayard