Sur les pages de mes sites ou blogs, je n’ai pas coutume de critiquer : la place est mesurée, le temps disponible pour la lecture de mes amies-amis est limité, au demeurant la vie est courte ; alors je préfère consacrer ce qui m’en reste imparti à parler, comme je le peux, d’exemples positifs et d’actions louables.
Mais toute règle de conduite souffre dérogation et là, je dois le dire, l’exception que je veux évoquer l’a quelque peu cherché. Je le pense et donc je le dis : Mme Liliane BOYER est une méchante femme.
Mme Liliane BOYER ? C’est depuis 2008 la maire du Muy, dans le Var. Le Muy, que j’ai connu par proximité familiale dès 1957 ; on s’y rendait alors par la Nationale 7 que chantait le poète. Cette charmante commune comptait environ 3 000 habitants, elle en recense aujourd’hui trois fois plus. La personnalité politique mémorable du pays fut Robert Aymard (1920-2012), homme politique SFIO et résistant, maire de 1947 à 1977.
Dans ce cadre paisible et radieux, une triste histoire pourtant commence en 2012 : née prématurément à 25 semaines, souffrant de plusieurs malformations cardiaques, Léa Ouazama-Baba mène une vie de combat et de courage avant de décéder le 26 août 2015 des suites d’une opération du cœur.
Dans le Var et sur les réseaux sociaux ce décès soulève un élan de compassion. Le 25 octobre 2015 plus de 500 bénévoles se manifestent et des milliers de ballons roses et blancs sont lâchés dans le ciel en hommage à la petite Léa.
L’association Tous derrière Léa et les enfants malades est présente dans près de 70 hôpitaux les 24 et 25 décembre pour faire passer le père Noël chargé de cadeaux.
Ses parents ayant décidé d’honorer la mémoire de Léa avec une sépulture personnalisée, l’opérateur funéraire leur proposa un monument rose, évocateur de l’enfance et de l’innocence. Hélas, ce monument ne semble pas avoir eu l’heur de plaire à tout le monde puisqu’il va rapidement subir une dégradation.
Jusque-là, direz-vous, ce n’est qu’un fait divers navrant mais microscopique, du Clochemerle contemporain, et il n’y a pas de raison que les Muysois soient exempts du petit pourcentage d’individus stupides que l’on recense partout ailleurs.
Oui mais… voilà : la société funéraire avait précédemment reçu un appel téléphonique de la maire, qui mettait en avant des plaintes d’usagers du cimetière.
Mme Liliane BOYER, rétroactivement, relativise sa démarche :
« Le cimetière est très fréquenté ; nous sommes une commune rurale, et certains sont assez choqué de voir une tombe rose vif. J’ai contacté l’opérateur funéraire pour poser des questions sur leurs monuments et leur faire remonter les commentaires sur le choix de couleur. Il n’y avait rien d’hostile dans ma démarche, et il n’a jamais été question d’enlever ou de faire changer la couleur de la tombe de la petite Léa. »
Lequel opérateur, M. Pineau est, lui, plus net :
« Mme le Maire s’est plainte du monument et voulait m’interdire de poser des monuments dans son cimetière. C’est, texto, ce qu’elle a dit. Je n’ai jamais vu ça : même dans les cimetières classés nous avons eu gain de cause. Ce qui me met en colère, c’est qu’au milieu de tout cela, il y a la tombe de Léa : qu’on laisse cette enfant reposer en paix ! »
Profanation ? La maire dément que la tombe de Léa ait été dégradée :
« Je suis atterrée et scandalisée de lire que la tombe aurait été, par coïncidence, et suite à ce qui précède, vandalisée. Rien n’est plus faux, puisque mon service de police municipale a constaté ce 15 mars, à ma demande, que la tombe n’avait été nullement vandalisée ou détériorée. »
M. Pineau confirme pourtant les dégradations et ne croit pas à l’effet d’une récente tempête :
« Une plaque funéraire emportée par le vent aurait pu abîmer la tombe, c’est une éventualité. Mais l’impact près de la stèle fait presque deux centimètres de profondeur. On a essayé, chez nous, en atelier, de le refaire, à la masse et au poinçon, c’est faisable, mais pas facile, et pas en un seul coup… Il faut déployer une force importante et répétée. »
Jessica, la mère de Léa, indique :
« Je suis persuadée que pour Mme Le Maire c’est une affaire personnelle. Depuis que je me suis présentée contre elle sur une liste apolitique (classée divers droite), la mairie ne nous a jamais laissé tranquilles. Quand Léa était encore là, nous avions droit à un macaron handicapé et pourtant on nous harcelait à chaque fois. On m’a refusé des places en crèche pour mes enfants, ça ne s’est réglé que quand j’ai appelé Var Matin ; on nous a refusé l’accès à la salle des fêtes pour organiser les réunions pour notre association… »
Evidemment, je ne rends pas Mme Liliane BOYER responsable de la profanation, acte d’un ou de plusieurs sombres crétins. Je signale ici simplement la froideur et le conformisme hostile de l’édile, alors que tant d’autres élus font quotidiennement la preuve de leur humanité et de leur aptitude à apaiser les conflits dans leur commune.
Et je m’associe au commentaire, pourtant plus sévère que le mien, de Géraldine Boyer, de Femme actuelle :
« Cette femme qui visiblement n’a pas un cœur de mère, mais bien un cœur de pierre. A croire que ce village paisible du Var n’a pas besoin de ses services, si elle a du temps à consacrer à ce genre de questions sans même se préoccuper des conséquences que cela peut avoir. Il y a des jours, comme ça, où on se dit que définitivement, l’être humain peut être aussi bête que méchant… »
17 mars 2016