2024 02 01 : Au Panthéon, oui, mais… avec son hélicon

Je rebondis ‑ comme il est coutumier de dire à tout propos, par certains qui manifestement manquent de ressort ‑ sur la récente proposition d’un rebelle (n’ayant pas noté, je ne sais plus s’il s’agit d‘Alain Finkielkraut ou de Gérard Larcher) : faire enfin entrer au Panthéon, temple laïque de nos gloires impérissables, le grand, l’exemplaire Boby Lapointe, immense poète devant les éternels (j’ai nommé Ronsard, Villon, Baudelaire, Apollinaire et tous leurs plumitifs).

Déjà que l’habituelle hésitation, procrastination des Immortels (je cible sans la nommer, évidemment, l’Académie Française) lui a fait manquer l’un des 40 fauteuils, qui aurait pu être par exemple, une gloire poétique succédant à une gloire militaire, celui du général Weygand, au lieu que soit élu son austère admirateur Louis Leprince-Ringuet.

S’il chanta Aragon ce fut avec Castille ; et lui, philosophe et esthète en plus d’être rimeur, plaida avec éloquence et talent contre la peine de mort, dix ans avant François Mitterrand et Robert Badinter. Et il surpassa Ronsard dans ses sonnets amoureux Ca va ça vient et L’insomnie.

En outre, enfin admis au Panthéon, Boby Lapointe donnerait un peu de chaleur à cette froide nécropole, où nos grands Hommes et Femmes se morfondent dans une gloire sévère ; et le soir venu, après que les visiteurs seraient partis, il s’y donnerait des noubas endiablées au son de l’hélicon.

Car bien entendu il serait inconcevable, insupportable, scandaleux, atterrant, de translater la dépouille de Boby au sommet de la montagne Sainte-Geneviève sans y transporter aussi son inséparable hélicon. Il s’agirait de surcroit d’une mesure de précaution et de protection de notre patrimoine contre de sordides convoitises, car de grands cuivristes envient secrètement cet instrument unique et Christie’s le lorgne insidieusement pour en faire son enchère du siècle !