Combien faut-il de fois secouer mes grelots [1]
Et baiser ton front bas, morne caricature ?
Pour piquer dans le but, de mystique [2] nature,
Combien, ô mon carquois [3], perdre de javelots [4] ?
Nous userons notre âme en de subtils complots,
Et nous démolirons mainte lourde armature [5],
Avant de contempler la grande Créature [6]
Dont l’infernal désir nous remplit de sanglots !
Il en est qui jamais n’ont connu leur Idole [7],
Et ces sculpteurs damnés et marqués d’un affront,
Qui vont se martelant la poitrine et le front,
N’ont qu’un espoir, étrange et sombre Capitole [8] !
C’est que la Mort, planant comme un soleil nouveau,
Fera s’épanouir les fleurs de leur cerveau !
Georges Chelon 1997
LUÍS DE FREITAS BRANCO 1909
[1] Au Moyen-Age les bouffons et saltimbanques étaient coiffés d’un bonnet à grelots.
[2] Qui concerne les pratiques, les croyances visant à une union entre l’homme et la divinité.
[3] Etui porté par le guerrier ou chasseur où il range ses flèches, lances ou javelots.
[4] Espèce de lances qui se projetaient à la main.
[5] Squelette métallique d’une statue. Figuré littéraire : plan, ébauche d’une œuvre, d’un récit, d’un poème.