Edito DH n° 77 juin-juillet 2001 : Les agences régionales de l’hospitalisation

Créées par l’ordonnance n° 96‑346 du 24 avril 1996, mises en place entre septembre 1996 et janvier 1997, les agences régionales de l’hospitalisation ont en quatre ans démontré leur efficacité. Il faut dire qu’elles naquirent au moment propice, au terme de quatre évidences :

Les directeurs d’hôpital n’avaient pas suffisamment manifesté d’aptitude, ni même d’appétence, à dépasser l’horizon de leur établissement et à inscrire dans la vie la coopération interhospitalière.

Les DDASS et DRASS n’avaient pas totalement démontré de capacité à impulser puissamment des formules de complémentarité intelligentes.

La « main invisible du marché » n’existant pas en matière hospitalière, il y fallait une main réelle, vigoureuse et sûre.

Seul l’échelon régional permet une action d’ampleur.

Mais on trouve dans le texte fondateur des ARH une tare consubstantielle : la défiance de la démocratie et de la concertation. Cette approche technocratique – qui semblait moderne dans les décennies 1960-1970, mais qu’on sait maintenant inféconde à long terme – postule que l’efficacité consiste à conférer le pouvoir à de grands commis, insensibles par culture ou insensibilisés par formation aux pressions ou à l’irrésolution des élus et à la palabre démocratique, perte de temps et émollient des volontés fortes.

Pour conforter la légitimité des ARH, il faut leur instiller de la démocratie. Mais comment ?

1° L’organe : La commission exécutive de l’ARH a pour objet de mettre à parité puissance publique et financeur, entités certes légitimement prééminentes, mais non directement représentatives : elle n’est pas le lieu d’une conciliation avec les acteurs de terrain. Faut-il créer une instance, une de plus ? Il en est déjà deux : CROSS et surtout conférence de santé, qu’il suffirait d’élargir, de fortifier, voire de fusionner. Puis créer entre elles et l’ARH des liens étroits et obligatoires.

2° La manière : Faudrait-il que les ARH consultent méticuleusement les fédérations d’hôpitaux et cliniques sur chaque restructuration envisagée, sur chaque budget ? Utopie. Ultra-démocratie illusoire. D’autant que l’essentiel pour l’ARH n’est pas d’obtenir l’assentiment de ses « victimes » ou bénéficiaires, mais de conforter sa légitimité.

3° Le contenu : Le talon d’Achille du dispositif de restructuration hospitalière, c’est la fiabilité et l’intelligibilité imparfaites des instruments de mesure qui prétendent fonder sa rationalité.

Fiabilité : le PMSI-MCO présente encore des faiblesses ; le PMSI soins de suite sort seulement des limbes, les autres PMSI spécifiques ne sont pas en vue. Or la restructuration ne sera à la hauteur des enjeux que si elle englobe toutes les disciplines et pas la seule MCO.

Intelligibilité : Cela échappe parfois aux techniciens du ministère et des instances centrales… ou à nous-même : le succès d’une politique suppose l’adhésion des acteurs : non seulement médecins et cadres, mais tous les personnels, les administrateurs… et les usagers.

Pour gagner cet assentiment, il faut convaincre et persuader de l’objectivité des outils de convergence ou de redistribution, donc les perfectionner et les rendre lisibles. Il y a là un énorme travail pédagogique, qui ne peut être mené à terme par l’ARH que si elle est en symbiose, non seulement avec les organisations professionnelles et les associations, plus ou moins représentatives, mais avec le terreau démocratique fondamental : politique et syndical.