Additions de la 3e édition (1868) : XII – LES PLAINTES D’UN ICARE

Les amants des prostituées
Sont heureux, dispos et repus ;
Quant à moi, mes bras sont rompus
Pour avoir étreint des nuées [1].

C’est grâce aux astres nonpareils [2],
Qui tout au fond du ciel flamboient,
Que mes yeux consumés ne voient
Que des souvenirs de soleils.

En vain j’ai voulu de l’espace
Trouver la fin et le milieu ;
Sous je ne sais quel œil de feu
Je sens mon aile qui se casse ;

Et brûlé par l’amour du beau,
Je n’aurai pas l’honneur sublime
De donner mon nom à l’abîme
Qui me servira de tombeau.

[1] Mythologie grecque : Ixion, un prince, voulut séduire Héra, l’épouse de Zeus, mais lorsqu’il l’étreignit elle se transforma en nuage.

[2] Vieux terme pour « incomparables ».