2020 04 30 : Prato, l’Italie exemplaire

Dernièrement les habitants de Prato ont sidéré les observateurs : alors que la plupart des villes de Toscane ont payé un lourd tribu à la Covid-19, Prato en fut relativement épargnée ou plus exactement sut mieux s’en prémunir.

La ville, avec 29 morts à ce jour, soit 15 pour 100 000 habitants, subit moins du tiers du taux de létalité COVID-19 italien (48 pour 100 000 habitants).

Cette ville compte 23 000 personnes d’origine chinoise, depuis 30 ans elle est la troisième communauté chinoise d’Europe après Londres et Paris, au point d’être surnommée « la petite Chine » et elle développe d’importants échanges économiques et commerciaux avec la Chine.

Beaucoup de ses commerçants sont rentrés de Chine dès le début de la pandémie et pourtant ils n’ont développé ensuite aucune Covid-19, car ils se sont immédiatement imposés une rigoureuse discipline, bien avant que soient édictées les directives nationales ou régionales italiennes. Le maire, Matteo Biffoni, estime que grâce à cette attitude ils étaient mieux préparés que les autres lorsque la tempête est arrivée.

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André Breton se piquait de saluer certains lieux comme des merveilles du monde ; on se souvient de ce qu’il dit de Nantes dans Nadja :

« Nantes : peut-être, avec Paris, la seule ville de France où j’ai l’impression que peut m’arriver quelque chose qui en vaut la peine. »

Et plus tard, en 1951, il établit sa résidence estivale à Saint-Cirq-Lapopie, dans le Lot, et déclara non sans l’emphase dont il usait et parfois abusait :

« C’est au terme de la promenade en voiture qui consacrait en juin 1950 l’ouverture de la première route mondiale – seule route de l’espoir – que Saint-Cirq embrasée aux feux de Bengale m’est apparue – comme une rose impossible dans la nuit. Cela dut tenir du coup de foudre si je songe que le matin suivant je revenais, dans la tentation de me poser au cœur de cette fleur. Par-delà bien d’autres sites – d’Amérique, d’Europe – Saint-Cirq a disposé sur moi du seul enchantement : celui qui fixe à tout jamais. J’ai cessé de me désirer ailleurs ».

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Quel rapport avec Prato ?

Mais la littérature, tout simplement, puisque l’enfant le plus célèbre de cette ville fut Curzio Malaparte qui y est né et enterré.

Sur sa tombe, lui qui avait connu toute l’Europe, les plus grandes capitales et les honneurs, moins déclamatoire qu’André Breton il fit simplement graver :

“Io son di Prato, m’accontento d’esser di Prato, e se non fossi pratese, vorrei non esser venuto al mondo”

« Je suis de Prato, je me contente d’être de Prato, et si je n’y étais pas né, je voudrais n’être jamais venu au monde ».

Et si vous voulez en savoir plus sur les qualités des Toscans et singulièrement des Pratéens, alors lisez l’un de ses derniers livres, Ces sacrés Toscans, où des pages et des pages leurs sont dédiées avec une coruscante ironie et une réjouissante mauvaise foi.

Car le superbe Malaparte, pour être moins pompeux que Breton, ne lui cédait rien en style étincelant.

30 avril 2020