2018 12 07 : Les confins du monde – film

Indochine, 1945 : un jeune militaire français, Robert Tassen (Gaspard Ulliel) est le seul survivant d’un massacre collectif perpétré par les Japonais en retraite, dans lequel son frère et sa belle-sœur sont tués.

Dès lors il ne pense plus qu’à une chose, se venger, et comme il a une conviction quant à l’identité du responsable du carnage, il s’engage dans une recherche solitaire et clandestine de l’assassin.

Dans cette poursuite obsessionnelle, il croise le chemin de Maï une jeune Vietnamienne (Lang-Khê Tran), de Cavagna, un engagé bagarreur (Guillaume Gouix) puis de Saintonge (Gérard Depardieu) un écrivain catholique échoué dans les confins de ce monde livré à la sauvagerie.

Je n’ai pas « aimé » ce film de Guillaume Nicloux : on ne peut pas aimer ce film.

On ne peut pas aimer un film qui nous plonge sans complaisance dans cette « sale guerre » d’Indochine que bien peu d’entre nous désormais ont connue ; mais ceux que j’ai connus pour y être allé et que je questionnais restaient silencieux ou éludaient… significatif, non ?

Je n’ai pas « aimé » ce film, car peut-on faire du beau, du grandiose, du cinéma d’esthète avec une sale guerre ? Elles le sont toutes certes, et la saloperie de celle-ci ne mit pas longtemps à être dépassée par celles-là.

Et à ce propos, contre l’avis presque unanime des critiques, j’ai détesté Apocalypse Now parce que Coppola parvenait à faire un « beau film » baroque avec les horreurs de la guerre et que, justement, c’était à mon sens une sorte de perversion cinématographique.

Ici, rien de tel. Je ne prétends pas départager Coppola vs Nicloux quant à leur talent de réalisateur ; je dis simplement que Nicloux nous livre sans clinquant ni tuning la détestable vision des sauvageries et la dimension pathologique de cette guerre infâme. Dans son film, au moins, on étouffe et on souffre, au lieu de vibrer en proie à quelque sensation indécente au son la chevauchée des Walkyries de Wagner, ou des Doors ou des Rolling Stones.

Il faut donc voir ce film extraordinaire et, dès qu’ils en auront l’âge, le montrer à vos enfants pour que demain, après nous qui ne l’avons bien su, ils éloignent le spectre de la guerre.

7 décembre 2018

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