Moi qui déteste en général injures, insultes, usage des gros mots (en tout cas par écrit et dans les relations interpersonnelles…) je tombe l’autre soir, pour la nième fois, sur la sentence ultra-fameuse du film Les Tontons flingueurs que Michel Audiard fait énoncer par Lino Ventura, qui l’un comme l’autre étaient tout sauf vulgaires :
« Les cons, ça ose tout. C’est même à ça qu’on les reconnaît »
Ne craignez rien, mes amies-amis de gauche (et qui envers et contre tout entendez le rester), je ne vais pas en inférer que les « socialistes » seraient des cons (j’écris ce mot soigneusement bordé de guillemets, car le terme générique, en philosophie et politique, de socialisme, c’est autre chose, n’est-ce pas monsieur Jaurès ?)
Donc ne craignez rien, mes amies-amis de gauche, non, non, non, les « socialistes » ne sont pas cons. Et je le démontre : les « socialistes » ne sont pas cons… puisqu’en fait ils n’osent rien.
Car il est maintenant admis et établi :
- qu’ils n’osent pas s’en prendre à la Finance, cette « ennemie »
- qu’ils n’osent pas s’en prendre à l’idéologie ultralibérale
- qu’ils n’osent pas tenter, oh rien qu’un peu, de combler le fossé des inégalités
- qu’ils n’osent pas traiter les défiances entretenues et antipathies recuites entre catégories sociales, peuples d’ici et d’ailleurs, nomades et sédentaires, croyants et athées
- qu’ils n’osent pas affirmer une politique étrangère émancipée des USA, dans la tradition du non-alignement français
- qu’ils n’osent pas affronter les intimidations des minorités agissantes et lobylisantes qui bloquent la reconnaissance des libertés encore à conquérir, celle du droit à l’euthanasie, par exemple.
Enfin, ils n’osent pas ‑ et là cela devient incompréhensible ‑ mettre en avant (ou alors si mal, ou alors si peu) les personnalités qui leur vaudraient l’indulgence sinon l’estime des Français : leurs bataillons d’élus locaux honnêtes, dévoués, compétents ; leurs militants impavides et inusables.
Un bel exemple m’est venu à l’esprit, celui d’une socialiste : Sophie Dessus, morte le 3 mars 2016.
Cette femme avait pourtant un parcours digne d’exemplarité pour le PS :
Petite-fille du juriste et académicien Henri Mazeaud, petite-fille de la cousine de Simone de Beauvoir, petite-cousine du gaulliste Pierre Mazeaud, président du Conseil constitutionnel de 2004 à 2007.
Après ses études d’histoire et d’histoire de l’art, elle s’installe en 1975 comme agricultrice en Corrèze. Elle aura quatre enfants.
Elle sera maire d’Uzerche de 2001 à sa mort. Elle recevra en 2007 des mains du président du Sénat une Marianne d’Or, prix d’excellence des municipalités de France, dans la catégorie aménagement urbain. En juin 2012, elle sera élue députée de la Corrèze, au premier tour, succédant à François Hollande, nouveau président de la République et devenant la première femme députée de ce département.
A l’Assemblée, Sophie Dessus était membre de la commission des affaires culturelles et de l’éducation, et membre de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre hommes et femmes.
Il aurait donc été vraiment con, effectivement, que les « socialistes », attentifs à monter en épingle la moindre posture à contre-emploi de leurs Vals, Macron, Hollande, Bartolone et autres gloires médiatiques, perdissent trop de temps et d’énergie à honorer, un peu mieux qu’ils ne l’ont fait, l’exemplarité de cette femme.
6 avril 2016