Depuis hier soir les principaux médias se lamentent au diapason de leur vocabulaire convenu pour ne pas dire monocorde : montée du FN, séisme, populisme, danger, etc.
Le plus consternant, c’est que ces doctes commentateurs et journalistes prétentieux commettent toujours la même erreur, depuis 40 ans au moins : examiner, scruter, gloser sur les résultats électoraux en pourcentages ; en pourcentages des suffrages exprimés.
Cela fait quant à moi à peu près 40 ans que je regarde d’abord les résultats réels, ceux qu’ont délivrés nos concitoyens : les suffrages en nombre de voix. Et cette année je dois dire que j’ai éprouvé quelque difficulté : en effet, à l’heure où j’écris (lundi 10 h 30) aucun grand média n’a daigné nous communiquer ces résultats en nombre de voix. Pas même le révéré Monde (qui n’est plus que l’ombre de ce qu’il fut). Il faut donc aller sur Wikipedia pour trouver ces données, et encore par région électorale, donc il faut en faire la somme pour obtenir les résultats nationaux.
Et lorsqu’on examine ces chiffres, l’enseignement de ce scrutin est sensiblement différent des clameurs journalistiques :
Le bond en avant du FN ? Faux. Avec 4 700 000 voix le parti néo-fasciste fait un excellent score, mais il perd un quart des 6 400 000 voix de Marine Le Pen en 2012. Le FN fait certes un tiers de voix de plus que ses 3 500 000 suffrages des législatives de 2012, mais on se souvient que c’est toute la droite (de l’extrême droite au centre droit) qui avait alors été sonnée par la victoire de F. Hollande quelques semaines auparavant.
Le principal évènement de ce scrutin européen c’est l’effondrement total du PS : avec 2 600 000 voix il ne sauve qu’un quart des voix de Hollande et un tiers de ses suffrages aux législatives de 2012.
Le deuxième enseignement majeur, tout aussi inquiétant pour la démocratie parlementaire telle qu’elle s’exerce depuis trente ans, c’est l’effondrement considérable lui aussi de la droite parlementaire : avec 3 900 000 suffrages, l’UMP ne conserve que 40 % de ses voix à la présidentielle et 60 % de ses voix à la législative de 2012. Et si l’on globalise UMP + MODEM + UDI + divers droite, leurs 6 500 000 suffrages n’atteignent pas 50 % de ce qu’ils avaient à la présidentielle et les deux tiers de leur score à la législative.
Le rejet de la politique de gauche atteint aussi le Front de Gauche – Parti de Gauche puisque, même s’ils se sont démarqués vigoureusement de la politique Hollande-Ayrault-Vals, leurs 1 200 000 voix ne conservent qu’un tiers de leur gain à la présidentielle et les deux tiers de leurs suffrages à la législative 2012.
Mais deux familles politiques peuvent se flatter d’une progression :
– Les « sans étiquette » ni droite ni gauche [1] qui totalisent 1 400 00 voix, le triple de 2012.
– Les écologistes qui en atteignant 1 900 000 voix doublent largement leur score de la présidentielle et font un tiers de mieux qu’à la législative suivante.
[1] Nouvelle donne, Nous citoyens, Citoyens du vote blanc, Europe citoyenne Corinne Lepage, Union populaire républicaine, Parti pirate, Espéranto, Parti fédéraliste européen, Féministes pour une Europe solidaire, Radicalement citoyen, Mouvement Bretagne et progrès-Parti breton, Régions et peuples solidaires, Démocratie réelle, Pour l’Union, une génération d’action !, Parti de l’In-nocence, etc.
26 mai 2014