2017 08 12 : Une vie violente -film

Comme moi sans doute, vous avez fini par en avoir votre dose des sujets, documentaires et films ressassant, façon soit couleur locale, soit révélations fracassantes ou commisération compréhensive, la « question » corse depuis qu’elle a surgi dans le champ médiatique, donc depuis Aleria en 1975.

Alors je m’engageai plutôt sur la pointe des pieds dans cette salle obscure, et surtout poussé par la météo débilitante après une quinzaine passée dans le Sud, pour aller voir ce film de Thierry de Peretti ; car son argument, lu la veille sur Internet dans une rubrique cinéma me donnait comme un sentiment de déjà vu :

« Malgré la menace de mort qui pèse sur sa tête, Stéphane décide de retourner en Corse pour assister à l’enterrement de Christophe, son ami d’enfance et compagnon de lutte, assassiné la veille. C’est l’occasion pour lui de se rappeler les évènements qui l’ont vu passer, petit bourgeois cultivé de Bastia, de la délinquance au radicalisme politique et du radicalisme politique à la clandestinité. »

Pourtant j’aurais été idiot de ne pas aller le voir, car si le film évoque certes les traditions corses : code d’honneur, vendetta, fierté, non-collaboration avec les autorités… il le fait non pour se pâmer stupidement devant ces nobles valeurs ancestrales mais pour en démontrer les raisons et les implications dans le processus de radicalisation nationaliste.

Et puis le récit de fiction qui structure l’œuvre donne aussi toute sa place à la démarche documentaire qui m’a semblé — pour autant évidemment que je puisse en juger — aller au plus près de la vérité historique qui commence à se dégager de cette tranche d’histoire. Une « génération perdue » qui se voulait engagée dans un juste combat, mais très tôt infiltré et souillé par le gangstérisme, le crime, avec l’exécution comme mode ordinaire de résolution des contradictions et les tortueux changements d’alliances et d’adversaires.

Cette génération déçue qui entre désormais dans la vieillesse et peut réfléchir à ses rendez-vous perdus.

Il y a également une sobre et belle peinture de la vie quotidienne ordinaire, sans oublier les paysages et les lumières de l’Ile de beauté.

Les acteurs, novices, sont saisissants de vérité : Stéphane (Jean Michelangeli), Christophe (Henry-Noël Tabary), Michel (Cédric Appietto) … et Jeanne (Marie-Pierre Nouveau).

Car le film n’oublie pas de restituer la place qui leur revient aux femmes dans cet univers réputé machiste.

12 août 2017

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